Et si la Brasimba s’adaptait à la concurrence du Lion sri-lankais?

Article : Et si la Brasimba s’adaptait à la concurrence du Lion sri-lankais?
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19 décembre 2019

Et si la Brasimba s’adaptait à la concurrence du Lion sri-lankais?


Ce n’est pas la poubelle d’un bar mais d’une petite entreprise où deux à trois agents ne se privent pas de cette bière vue leurs heures de travail. Beni, Nord-Kivu ©Hervé Mukulu
Depuis près d’une année, la Lion, cette bière en canette d’origine sri-lankaise, se consomme comme des cacahuètes dans le Grand-Nord de la province du Nord-Kivu. Grande, de bonne qualité, du moins pour les amateurs de la bière brune et de forte dose, 12 pourcent d’alcool. Et je suis convaincu qu’elle rogne une partie de la clientèle de la Brasimba, issue d’une jeune entreprise brassicole installée à Beni depuis environs cinq ans et qui peine encore à convaincre par la qualité de ses produits.

Mon premier réflexe, quand je vois le ravage que fait cette nouvelle bière à canette sur la clientèle de  la Brasimba, a été de penser à demander qu’on interdise l’importation de cette bière qui nous vient de si loin, le Sri Lanka. Je ne sais même situer ce pays asiatique.  Les économistes appellent cela du protectionnisme. Ça a été le cas pour les sucreries brassicoles qui venaient de l’Ouganda voisin et qui sont de qualité nettement supérieure à ceux produits localement.

Mais pourquoi, cette bière n’est pas interdite d’entrée ? Je suppose, à la congolaise, que son importateur  a des relations très haut placée.  C’est alors que je me mets à réfléchir autrement : « Pourquoi la Brasimba ne devrait pas plutôt s’adapter ? »

Les jeunes, victimes faciles pour la bière sri-lankaise

J’ai des bonnes raisons d’appeler la Brasimba à faire des ajustements convenables à sa clientèle.  Nous sommes tous conscients du désastre que les liqueurs à fortes doses et très moins chères sont en train de causer chez les jeunes. Mon séjour dans le secteur Ruwenzori, la partie de la province de Nord-Kivu qui est plus proche de l’Uganda, a été triste. Car les jeunes passent le clair de leur temps à s’enivrer avec ces boisons prohibées. Ils ne cherchent plus à prendre la relève, ils sont oisifs, en perpétuel lundiose, laissant l’agriculture à leurs vieux parents qui les nourrissent encore. Les mêmes ravages sont également à l’œuvre dans les centres urbains.

Il faut savoir que certains amateurs de liqueurs prohibées les ont abandonnés pour cette bière forte en cannette. « Tout ce que je cherche c’est m’enivrer. Je prends deux à trois ‘Chief’ [une marque de liqueur vendue clandestinement] et je suis bien. Mais j’ai presque le même effet avec un seul ‘Lion’. L’avantage avec le Lion est que je ne me cache plus pour boire, témoigne George K., un motard. Ma femme l’accepte chez moi. »

La classe moyenne plus durement touchée

Il n’y a rien de plus doux qu’une bonne bière après une dure journée au boulot. Néanmoins, pour se sentir relaxé, il faut deux à trois bières minimum. Ce qui revient à 5000 FCFA (3$), alors que l’on a le même effet avec une seule bière en canette, qui coûtera entre 1700 et 2300 FCFA (environ 1.3$). Donc la moitié du budget avec un sacré avantage : « On est pas obligé de boire dans la buvette. On achète sa bière et on peut la boire tranquille chez soi, au Tedja avec des potes, n’importe où. »

Si cette classe moyenne s’affiche de plus en plus en plus avec cette nouvelle bière, elle devient réel danger pour la jeune entreprise Brassicole locale qui emploi pas mal des jeunes diplômés locaux qui trimaient au chômage et qui risquent d’y ré-pointer si les produits ne s’écoulent pas.

Dans le Katanga, La Brasimba produit déjà une marque de ses bières dans les cannete à emporter. Il ne reste plus qu’à augmenter le taux d’alcool dans deux produits : une brune et une bonde et le tour sera joué. Et surtout de prendre soins de trouver des cannettes écolo. Car pour les jeunes intellectuels d’aujourd’hui cela serait aussi un argument et pas le moindre.

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